Le secourisme : entre formation et passion

Catastrophe du Mont St Odile - article 2 : impact et survivants

Après avoir vu comment s'était déroulé le vol, revenons sur l'impact et les dégâts matériels afin de mieux appréhender l'ampleur de la chance qu'ont eu des passagers et du personnel navigant à être vivant.

2ème partie : impact et survivants

I Répartition de l'épave


Dès les premiers impacts avec les arbres, des éléments de l'avion se sont détachés. Le premier élément retrouvé est un morceau de nacelle du moteur gauche qui se trouve près du pied du premier arbre endommagé. Viennent ensuite de nombreux morceaux de voilure gauche, d'empennage, de carénage inférieur de fuselage, de trappe de train d'atterrissage et d'éléments de cockpit dont un balai d'essuie-glace et des morceaux de radome (radome = dôme abritant les installations radar, protégeant les antennes des intempéries).



Les premières traces d'impact de l'avion sur le sol sont situées une trentaine de mètres après les premiers arbres endommagés. Dans cette zone, on trouve également une des jantes du train avant et son pneu.



On trouve ensuite de nombreux morceaux de petit volume; parmi ceux-ci, le montant central de pare-brise enchâssé dans une souche et un morceau du cadre 64 (ce cadre est situé en arrière du dernier hublot), ainsi que le vérin de manoeuvre de la porte cargo avant.

Après ces débris on trouve les premiers éléments volumineux de l'épave.

A environ 40 mètres des premières traces d'impact sur le sol se trouve la structure arrière de l'avion contenant l'empennage et le cône de queue qui contient le groupe auxiliaire de puissance (APU = Auxilliary power unit). Celui-ci n'a pas souffert du feu qui a sévi en avant de sa cloison pare-feu, et il est quasiment intact.

L'empennage est fortement endommagé par l'impact et le feu. La structure dans la zone située entre la cloison pare-feu APU et le cadre 65 a été entièrement détruite par le feu. Les résines des parties composites (dérive et PHR) sont entièrement consumées. La cloison de pressurisation est également détruite par le feu. Les enregistreurs (le CVR = Cockpit voice recorder = enregistreur phonique et le DFDR = Digital Flight Data Recorder = enregistreur numérique des paramètres de vol), installés dans cette zone, y ont été retrouvés.



Le cône de queue, en arrière de la cloison pare-feu de l'APU, n'est endommagé ni par le feu ni par l'impact.

Quelques mètres en avant de l'empennage, on trouve la partie arrière du plancher de la cabine passagers comprise entre les cadres 64 et 57. Sur ce plancher se trouvent, du côté gauche, les sept derniers rangs de sièges passagers, et du côté droit, le dernier rang de sièges passagers et le siège du PNC (personnel navigant de cabine = hôtesses et stewards). Le siège PNC côté gauche ne se trouve plus sur le plancher. Les sièges passagers sont relativement peu endommagés. Le quart inférieur droit du fuselage entourant normalement ces sièges se trouve sous cette partie de plancher. Le quart supérieur droit de cette partie de fuselage a été détruit par le feu. La partie restante a été retrouvée attachée au tronçon central de fuselage.



Quelques mètres à gauche du plancher cabine se trouve un tronçon d'aile gauche et son mât réacteur.

A côté du tronçon d'aile gauche se trouve la jambe de train principal gauche qui est brisée transversalement au niveau du fût.

A droite du cône de queue, dans le sens de la trajectoire, on trouve un morceau d'aile droite avec la jambe de train principal droit en position sorti.



Une quinzaine de mètres en aval du plancher de la cabine arrière se trouve le tronçon central de fuselage compris entre les cadres 35 et 47. Cette section est peu endommagée mécaniquement. Par contre, elle a souffert d'un feu extérieur, surtout sur sa partie droite. Tous les sièges qui y étaient situés, ainsi que leurs occupants, ont été projetés à l'extérieur vers l'avant.

Dans cette zone du tronçon central ont été également retrouvés une armoire de la soute électronique, de nombreux calculateurs ou parties de calculateurs, et le QAR (Quick Access Recorder =  enregistreur de paramètres pour la maintenance). Le boîtier, fortement endommagé, de la balise de détresse se trouvait également dans cette zone.



Le reste de l'avion, c'est à dire la plus grande partie, est réparti sur toute la zone dans un état de dislocation intense. En particulier, le cockpit, et plus généralement toute la partie située entre la pointe avant et le cadre 35, (cadre situé au niveau du bord d'attaque de l'aile) a été disloqué par les impacts successifs contre le sol et les arbres et ses éléments ont été retrouvés répartis sur une grande surface et dans un état de fragmentation important.

II Incendie

Les analyses anatomo-toxicologiques pratiquées sur les victimes permettent de dire qu'il n'y a eu ni incendie ni dégagement de fumées toxiques avant l'impact. Il n'a en effet été retrouvé aucune trace de fumées, gaz ou matières dans les voies respiratoires de ces victimes.

Trois foyers d'incendie ont été constatés sur le site de l'accident.

Le dossier de vol de l'avion permet d'évaluer à environ 4500 litres la quantité de carburant encore présente dans les réservoirs au moment de l'accident. Une partie du kérosène a pu être pulvérisé sur le site lorsque les ailes ont été arrachées.

Bien que n'ayant pu être identifiée formellement, l'origine la plus probable des foyers d'incendie est l'inflammation du kérosène entrant en contact avec des parties chaudes des réacteurs.



A l'état vapeur, le kérosène peut être enflammé en présence d'une flamme ou d'une étincelle dès que la température atteint 42 °C ("point éclair"). A l'état liquide, en contact avec une source de chaleur dont la température est supérieure à 250° C, le kérosène s'auto-enflamme.

Du point de vue de l'extension des foyers, celui situé dans la zone avant a été le plus important . Il s'est probablement déclaré au moment de l'impact ou très peu de temps après. Des examens réalisés sur des pièces d'alliage à base de titane et des amalgames d'alliage à base d'aluminium ont montré que la température maximale à laquelle ces éléments de l'épave ont été soumis était de l'ordre de 700 °C.

Le foyer situé dans la zone centrale, à droite du fuselage, semble s'être propagé à retardement par écoulement de carburant provenant sans doute des restes d'un réservoir de l'aile droite. En effet, un survivant grièvement blessé aux chevilles a témoigné avoir été brûlé bien après le crash malgré ses efforts pour s'éloigner du feu en progression. Il semblerait, toujours d'après son témoignage, que deux passagers survivants mais très grièvement blessés, aient été atteints et carbonisés par le carburant enflammé qui se répandait.

Le foyer situé dans la zone arrière est moins étendu que les premiers. Il semble avoir été essentiellement alimenté par le carburant destiné à l'APU. Les enregistreurs CVR et DFDR ont été retrouvés dans cette zone. Les examens réalisés sur ces enregistreurs ont permis d'évaluer à 700 °C la température atteinte sur un flanc du carter du DFDR. L'examen d'un amas d'alliage d'aluminium dans lequel étaient coincés des fils de cuivre, et d'une tôle à base d'aluminium, a permis d'estimer que localement dans la partie arrière la température maximale atteinte était comprise entre 500 et 800 à 1000 °C.

III Configuration cabine en descente et au moment de l'impact

D'après la transcription du CVR, l'annonce par le PNC du début de descente est faite 12mn31sec avant l'impact final. Il ne semble pas qu'il y ait eu une quelconque annonce du PNT (le commandant de bord et le copilote) sur le public address ou sur l'interphone.

Deux minutes plus tard, le PNC demande aux passagers d'attacher leurs ceintures. Cette annonce semble faire suite à l'allumage par le PNT de l'indicateur "attachez vos ceintures". L'avion passe le niveau 100 en descente, le copilote effectue sa check-list et annonce "Seat belts on".

Le levier de sortie du train est actionné 55 secondes avant l'impact, l'annonce par le PNC de vérifier que les ceintures sont attachées et les tablettes relevées commence 43 secondes et se termine 11 secondes avant l'impact.

L'hôtesse en A4 est attachée. D'après son témoignage, sa collègue, assise normalement en A3, lui a offert d'effectuer la vérification de la cabine pendant qu'elle même, avant de s'attacher, terminait le rangement et le verrouillage du galley.

Il apparaît que toutes les consignes ont été appliquées, dans un temps relativement court.

Tous les passagers étaient très probablement attachés au moment de l'impact.

IV Répartition à bord des survivants à l'accident

Huit passagers et une hôtesse ont survécu à l'accident. Sur ces neuf survivants huit étaient installés dans la partie extrême arrière de la cabine. Le neuvième survivant était assis au rang 14 côté hublot au niveau du milieu de l'aile gauche (voir le plan de répartition des survivants en annexe 5). Ce passager, victime de multiples fractures aux chevilles, semble avoir été éjecté au moment de l'impact (il se souvient parfaitement s'être sanglé de manière un peu lâche avec sa ceinture, et être revenu à lui à l'extérieur de l'avion).



Source : Rapport de la commission d'enquête F-ED920120


Prochain article : les causes du décès des occupants et l'organisation des secours


23/08/2008
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 55 autres membres